Leur regard se croise, et l’atmosphère change imperceptiblement. Il y a une tension, un mélange d’amusement et de curiosité, comme si cet échange anodin avait ouvert une porte vers quelque chose de plus troublant.
— “Et vous ?” lui demande-t-elle soudain, prenant l’initiative. “Que faites-vous devant cette vitrine ?”
Il sourit, presque malicieusement.
— “Peut-être que je cherchais de l’inspiration… ou une muse.”
Mady réfléchit un instant, cherchant un lieu qui lui ressemble, mais qui serait aussi assez insolite pour prolonger ce moment unique. Puis une idée lui traverse l’esprit, et un sourire joue sur ses lèvres. Restons dans les boudoirs pense-telle
— “Vous connaissez le Boudoir des Lettres, rue des Artistes ?” demande-t-elle.
Arthur joue l’intrigué de son regard
— “Un boudoir littéraire ? Non, mais le nom me plaît déjà.”
— “C’est un endroit un peu hors du temps. Un salon feutré, rempli de livres anciens et contemporains, avec des fauteuils confortables et une lumière tamisée. On y boit du thé ou un verre de vin, et parfois, il y a des lectures ou des discussions. C’est… intime, mais pas trop.”
Il la regarde, amusé.
— “Vous m’invitez dans votre univers. J’accepte avec plaisir.”
Quelques minutes plus tard, ils arrivent devant une porte discrète ornée d’un écriteau en laiton, où s’inscrivent en lettres élégantes les mots “Le Boudoir des Lettres”. Mady pousse la porte, laissant échapper un léger tintement de cloche, et ils entrent dans un espace chaleureux où des étagères débordent de livres, du sol au plafond.
Des fauteuils en velours, des tables basses en bois patiné, et un doux parfum de papier ancien et de thé flottent dans l’air. Une femme derrière un comptoir les salue avec un sourire, mais Mady l’ignore presque, se dirigeant instinctivement vers un coin intime près d’une bibliothèque de poésie.
— “Voilà,” dit-elle en s’asseyant dans un fauteuil moelleux. “C’est ici que je viens quand j’ai besoin de me retrouver… ou de me perdre.”
Arthur s’installe en face d’elle, observant l’endroit avec un mélange d’émerveillement et de respect.
— “Je comprends pourquoi. Cet endroit vous ressemble : élégant, calme, mais avec des secrets à découvrir.”
Elle lève les yeux vers lui, surprise une fois de plus par sa capacité à la cerner.
— “Et vous, Arthur ? Vous êtes à l’aise dans ce genre de lieu, ou c’est totalement nouveau pour vous ?”
Il rit doucement, un éclat sincère dans ses yeux.
— “Disons que ce n’est pas mon terrain habituel. Mais j’aime sortir de ma zone de confort. Surtout quand c’est pour quelque chose d’aussi singulier.”
Leur conversation se poursuit, alternant entre des confidences légères et révélations plus profondes. Mady découvre que Arthur a une passion pour les vieux bâtiments, qu’il adore les voyages spontanés et qu’il a toujours un carnet dans sa poche pour y griffonner des idées ou des croquis.
De son côté, elle lui parle de son amour des mots, des traductions qu’elle choisit parfois comme des défis personnels, et de son besoin de solitude pour réfléchir… mais aussi du vide que cette solitude lui impose parfois.
Le temps semble s’étirer dans ce boudoir littéraire, chaque mot échangé renforçant ce lien naissant entre eux. Et lorsque la nuit tombe doucement à l’extérieur, Arthur pose une question, presque à voix basse :
— “Alors, Mady, est-ce que ce tourbillon dont vous parliez vous effraie toujours autant ?”
Elle sourit, son regard plongé dans le sien.
— “Peut-être un peu moins. Peut-être que parfois, il faut juste se laisser emporter.”
Alors qu’ils sont engagés dans une discussion animée, Arthur remarque que Mady n’a toujours pas retiré son trench-coat, malgré la chaleur confortable du boudoir littéraire. Son col est légèrement relevé, et elle garde ses mains croisées sur ses genoux, comme si elle s’abritait derrière cette barrière de tissu, avec élégance certes, mais cette enceinte de tissu existe.
Il s’interrompt un instant, la fixant avec douceur.
— “Vous n’êtes pas à l’aise ?” demande-t-il, intrigué.
Elle relève les yeux, surprise par la question, avant de suivre son regard vers son manteau. Elle esquisse un léger sourire, presque gêné.
— “Oh… non, ce n’est pas ça. C’est juste… une habitude, je suppose.”
Mais Arthur sent que la réponse n’est pas tout à fait sincère, ou teintée d’une fausse note
— “Vous savez, ici, personne ne vous juge. Pas même moi,” ajoute-t-il avec un sourire rassurant.
-En êtes-vous vraiment sûr Arthur ?
Mady hésite, ses doigts jouant machinalement avec la ceinture de son trench-coat. Finalement, elle lâche un petit soupir.
— “Ce manteau, c’est comme une armure. Je m’y accroche parfois, quand je ne suis pas sûre de moi. Ou… quand je veux me protéger.”
Ses mots tombent dans un silence fragile. Arthur, loin de la presser, lui répond avec une douceur qui la désarme un peu plus.
— “On a tous nos armures. Mais parfois, il faut les poser, juste un instant, pour sentir qu’on est vraiment là.”
Elle le regarde, troublée par la justesse de ses paroles. Puis, lentement, presque comme un geste symbolique, elle défait la ceinture de son trench-coat et glisse légèrement le vêtement sur l’arrondi de ses épaules tout en croisant élégamment ses jambes de bas voilées
Arthur l’observe, intrigué mais toujours respectueux, incapable de deviner ce qu’elle cache derrière cette barrière de tissu.
La révélation le laisse sans voix. Mady n’est vêtue que d’une sublime lingerie, un ensemble en dentelle noire délicate, qui épouse son corps avec une élégance audacieuse. La lumière tamisée du boudoir joue avec les motifs de la dentelle, créant des ombres subtiles qui accentuent chaque détail. Il est figé, ses yeux s’attardant sur elle sans aucune vulgarité, mais avec une admiration palpable. Il ouvre la bouche, cherchant ses mots, mais c’est Mady qui prend la parole, brisant le silence avec un sourire à la fois malicieux et vulnérable.
“Avant que vous ne pensiez quoi que ce soit, je ne comptais pas montrer ça à qui que ce soit. J’ai acheté cet ensemble sur un coup de tête, peut-être pour me rappeler que je peux encore être audacieuse. Alors quand vous m’avez suggéré d’aller ailleurs ,je ne savais pas où aller… Alors je suis entrée ici, avec mon trench-coat comme unique bouclier.”
Elle s’arrête, cherchant une réaction dans le regard du désormais complice de son comportement, mais il reste immobile, comme s’il mesurait la portée de ce qu’elle venait de lui confier.
“Vous êtes incroyable,” finit-il par dire, la voix basse, presque un murmure.
Elle fronce légèrement les sourcils, troublée.
“Incroyable ? Pourquoi ?”
Il s’appuie légèrement sur le bord de son fauteuil, comme pour se rapprocher sans briser la distance respectueuse qu’il maintient.
“Parce qu’il faut une audace folle pour faire ce que vous venez de faire. Mais surtout, parce que derrière cette audace, je vois une femme qui veut retrouver une partie d’elle-même. Pas pour les autres, pas pour moi… mais pour elle-même.”
Ses mots frappent juste, et Mady sent ses défenses tomber, une à une. Elle aurait pu se sentir exposée, jugée, mais au contraire, elle se sent comprise, presque magnifiée.
“Et maintenant, Arthur ?” demande-t-elle, une lueur de défi dans les yeux.
Il sourit, un sourire sincère, dépourvu de toute prétention.
“Maintenant, on commande un verre de vin. Et on continue à parler, comme deux personnes qui découvrent, peu à peu, ce qui se cache vraiment sous leurs armures.”
Elle éclate de rire, un rire franc, libérateur. Puis elle acquiesce, attrapant la carte des boissons posée sur la table basse.
“D’accord. Mais vous choisissez le vin. Je vous préviens, je suis difficile.”
Arthur hoche la tête, l’ombre d’un sourire aux lèvres. Le moment était audacieux, inattendu, mais il était devenu quelque chose de plus : un instant de vérité partagé entre deux âmes commençant à se dévoiler, bien au-delà des apparences.
Arthur, qui n’avait pas quitté Mady des yeux depuis qu’elle avait dégagé légèrement son trench-coat, finit par se redresser dans son fauteuil, un soupçon de nervosité traversant son regard. Il passe une main dans ses cheveux, comme pour se donner une contenance, puis prend la parole d’une voix douce, presque hésitante :
“Mady… Je ne veux pas que vous preniez ça mal, mais… peut-être que vous devriez refermer votre manteau.”
Elle arque un sourcil, surprise, un mélange de confusion et de déception passant brièvement sur son visage.
“Pourquoi ? Je vous mets mal à l’aise ?” demande-t-elle, une pointe de défi dans la voix. Finalement, vous me jugez ?
Arthur secoue la tête, cherchant ses mots.
“Ce n’est pas ça. Enfin, peut-être un peu. Pas parce que ce que vous portez me dérange… c’est magnifique, vraiment. Mais je crois que c’est plus… moi. Je ne veux pas manquer de respect à ce moment, ni à vous. Et je ne veux pas que les autres ici vous regardent comme une curiosité. Ce moment… il me semble trop intime pour être partagé avec d’autres.”
Mady reste silencieuse, scrutant son visage. Elle s’attendait à beaucoup de réactions, mais pas à celle-ci. Ce n’était ni du jugement ni un rejet, mais quelque chose de plus subtil, de plus fragile. Finalement, elle hoche lentement la tête, ajuste le vêtement sur ses épaules, sans le fermer complétement.
“Vous êtes plein de surprises, Arthur,” dit-elle doucement, un sourire naissant sur ses lèvres.
“Je pourrais dire la même chose de vous,” répond-il, un éclat malicieux dans le regard.
Elle le fixe, amusée, mais un brin intriguée.
“Alors, dites-moi… est-ce un manque d’audace ou un excès de pudeur ?”
Il rit doucement, son regard se faisant plus intense.
“Disons que je préfère prendre le temps de découvrir une femme pour ce qu’elle est, plutôt que de me laisser distraire par ce qu’elle montre. Et vous, Mady… vous méritez qu’on prenne ce temps.”
Elle reste sans voix, touchée par la sincérité de ses mots. À cet instant, elle comprend que Arthur est différent, et que ce jeu entre eux, aussi imprévisible soit-il, vient de prendre une profondeur qu’elle n’attendait pas.
Mady arque un sourcil, intriguée par sa retenue, et un sourire malicieux effleure ses lèvres.
— « Vous avez peur que je vous surprenne davantage ? demande-t-elle, sa voix jouant sur un ton mi-taquin, mi-sérieux.
Arthur secoue légèrement la tête, son sourire sincère et presque désarmant.
— « Pas du tout. Je suis déjà surpris, Mady. Par vous, par votre audace, par cette façon que vous avez de transformer une simple rencontre en quelque chose de… captivant. Mais je crois que ce serait un gâchis de brûler les étapes.
Elle le fixe, cherchant dans son regard s'il était sincère ou s'il jouait simplement une carte de prudence. Mais ce qu'elle y voit, c'est une chaleur honnête, une curiosité qui semble bien plus intéressée par ce qu'elle est, plutôt que par ce qu'elle montre.
— « Je vous surprends, mais vous restez là. Vous continuez à vouloir découvrir… alors que vous pourriez partir, éviter ce tourbillon dont vous parliez », dit-elle doucement, une pointe de défi dans sa voix.
Arthur laisse échapper un léger rire.
— « Je crois que partir serait bien plus effrayant que de rester. »
Mady reste silencieuse un moment, jouant doucement avec le bord de son trench-coat. Puis, elle se penche légèrement vers lui, ses yeux brillants d'une lueur énigmatique.
— « Alors restez. Et choisis ce vin, Arthur.
Il acquiesce doucement, un sourire au coin des lèvres.
— « D'accord. Mais je préviens : je vais choisir un vin qui nous obligera à rester ici un bon moment. Parce que je ne suis pas encore prêt à quitter cet endroit, ni vous.
Mady le regarde, amusée, mais touchée par cette déclaration subtile. Pour la première fois depuis longtemps, elle s'autorise à être elle-même, sans masques, sans armures. Alors qu'il appelle la serveuse pour commander une bouteille de vin rouge, un Saint-Émilion au caractère affirmé, Mady se détend complétement. Elle croise ses jambes avec élégance, ses bas voilés reflétant discrètement la lumière tamisée, et se penche légèrement en avant, prête à reprendre leur conversation. Ce moment, intime et fragile, est devenu un espace où le temps semble suspendu. Mady et Arthur, deux âmes en quête de réponses, explorant un dialogue où les silences parlent autant que les mots. Une bouteille entre eux, et une soirée qui promet d'être bien plus qu'une simple rencontre fortuite.
A SUIVRE...
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