« Il s'établit rapidement entre tous les amants
des règles du jeu dont ils n'ont pas conscience mais qui ont force de loi et
qu'il ne faut pas transgresser »
L'insoutenable légèreté de l'être (1984) Milan Kundera
Au sortir du parking, le soleil timidement perce la
lourde couverture nuageuse. Ainsi éclaboussée de lumière, Louise n’en est que
plus désirable, son espièglerie érotique au bord de son regard si vert.
Naturellement, elle fouille dans le fond de son sac, en ressort un bâton de rouge
à lèvres et un miroir dans lequel elle recherche le reflet de ses lèvres. Elle
les mord pour les humidifier, puis, d’un majeur étonnamment habile, elle en suit
le pourtour, avant de les maquiller de rouge ! Elle aime le regard que
pose Romuald sur ses simples gestes de mise en beauté. Il observe avec
gourmandise cette bouche exprimer sa sensualité avec un naturel déconcertant.
Cette femme est émouvante de féminité, pense t-il, une raideur envahissante
sous la toile de son pantalon. Louise la mutine, attentive à la moindre
démonstration érotique, experte en magnétisme pervers ose une réflexion aussi
cruelle que provocatrice.
« Je vous vois poindre, allons un peu de
retenue, que diable, ou à l‘inverse, laissez vous aller. J’adore vous deviner
bander pour moi
-Mais ne laissez vous donc jamais les autres
s’exprimer sans intervenir, altérer, détourner
-Exprimez-vous, je n’attends que cela depuis notre
première
rencontre, j’attends la revanche, sexy revenge, le retour du bâton,
sans mauvais jeu fripon… Mais avouez, vous me tendez la perche …je ne résiste
jamais à un homme séduisant qui bande en intuition de mes démons … Là j’ai
juste envie, d’enfiler mes longs gants de cuir glacé, d’ouvrir votre braguette,
de libérer votre sexe, de le caresser jusqu’à l’extrême limite puis de
l’enrober d’une corolle de gloss rouge carmin …mais tel n’est pas son destin
proche. Je vais oublier mes instincts de
suceuse et mes ambitions gourmandes. Donnez-moi vos lèvres, ça ira !
-Garce !
-Encore, il ne faudrait pas que cela devienne une
habitude, un gentil sobriquet, à la limite assortie de délicieuse !»
Elle lui sourit adorablement, il craque !
« Quelle direction, dois je prendre ?
-Place Clichy ! Pigalle !
-Un guet- apens crapuleux ?
-Laissez donc vos fantasmes de coté le temps d’un
déjeuner ! »
A cette heure de la journée, les parkings parisiens
sont bondés dans ce quartier, et les rues grouillent de monde, beaucoup
d’étrangers, Pigalle malgré les ans, n’a rien perdu de sa réputation de
quartier chaud. Pourquoi Romuald a-t-il
préféré ce parking en plein Pigalle à celui plus proche du restaurant, de
Clichy Montmartre. Louise ne peut s’empêcher de songer que c’est une manière
bien personnelle qu’il a de la confronter au glauque du
quartier, à savoir
l’enfilade ininterrompue de peep show et autres sex-shops. Elle resonge à la
robe qu'’il lui avait réclamée, elle resonge …Il la fait marcher vite, très vte,
pourtant il n’a aucune idée de l’adresse du restaurant .Se joue-t-il soudain de
ses abus autoritaires, de cette manière proche du sadisme dont elle l’a
malmené ? Ses aiguilles ralentissent son allure, elle se pend à son bras,
elle va le supplier, elle supplier, elle n’en revient pas, de ralentir le pas.
Peut-être l’entraine-t-il dans une de ces boutiques spécialisées en lingerie
coquine et plus si affinités… il n’a pas aimé son affront, c’est cela, cette
robe est la clé de cette mystérieuse promenade à un rythme effréné.
« Nous y voilà »
Il vient d’interrompre ses hypothèses en même temps
que la course en l’entrainant dans un vieil immeuble tout proche de l’angle de
la rue Lepic. La prenant par la taille, il l’invite à gravir les étages en
prenant soin de bien se positionner derrière elle. Il ne veut rien perdre de ce
déhanchement, le galbe de ses fesses dont il ne peut plus se poser la question
s’il porte encore ou plus des dentelles. Il glisse sa main dans sa poche à la
recherche de ce délicieux intrus du sexe glabre, la petite culotte. La portant
à ses narines, le temps de l’ascension, il rêve, il imagine l’idéal d’un
scenario, Le creux des reins de Louise, la courbe qu'’ils dessinent quand elle
est sur le ventre allongée. Elle lui offre son corps, sans aucune ligne blanche de pudeur. A la lecture de ses pleins et déliés, il
ne sait plus qui de sa bouche ou de ses mains va d’abord explorer ses trésors,
mais cette fois, il le sait, il ne lui laissera pas le choix des armes. Sur le
palier du deuxième étage, il a envie de la bousculer de ses émotions, mais la
réalité l’arrache à ses tentations. Il glisse la clé dans la serrure, pousse la
porte à bout de bras au dessous de Louise, puis la bouche dans ses cheveux,
près de son oreille, il lui murmure :
« C’est mon futur chez moi, entrez »
A cet instant précis, sentant la réelle présence de l’autre,
dans un élan de tendresse et de fougue, Louise se retourne pour unir sa bouche
rouge de désir aux lèvres de Romuald, dans un baiser sans équivoque possible.
Le moment idéal pour lui faire enfin baisser les yeux, ce regard pénétrant dont
elle aime jouer, abuser, rompre les règles abusives de son jeu dominateur .Il le
sait Romuald, elle est bien plus sensible qu'’elle ne veut le montrer. Son
corps frissonnant est un aveu !
Dans les gravats et la poussière d’un appartement en travaux,
il cherche à élucider le mystère troublant de cette femme qui lutte avec ses émotions.
Prêter sa confiance prévaut à toute séduction maladroite .Louise, lui plait,
lui plait vraiment ! Bien au-delà de son physique !
Il savoure sa sensualité dans l’écoute des moindres
sens de Louise avec une intensité inconnue jusqu’ici, ses moindres bruits, même
les plus imperceptibles.
A suivre …
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