Hier soir, salle obscure au programme
L'Apollonide -Souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello
Je vous avais déjà parlé de ce film au moment du festival de Cannes
Il y a le bordel sur la Croisette
Bertrand Bonello nous offre dans ce merveilleux film, un récit à huit clos , romanesque et envoutant autour des douze pensionnaires de ce joli bordel.
Bien j’aurais pu vous écrire une critique dans le style habituel de mes écrits. A vrai dire je n’en ressens pas le courage, ni même le talent.
Tant et tant d’émotions cohabitent entre ces murs, douceur, tendresse, mais aussi violence , impudeur , mais aussi pudeur . Confidence, nostalgie, détresse …l’amour plane comme une ombre.
Des hommes on ne finit que par voir des masques, des personnages qui s’effacent …C’est mon ressenti. Mais le vrai premier rôle en revient à « L’Apollonide », la maison close
Avec pudeur et discernement, Bertrand Bonello, laisse planer sa caméra dans cet endroit particulier aux allures de théâtre. L’élégance est toujours présente
Il y filme le corps des femmes avec la plus belle des pudeurs
En résumé, ce film est une véritable merveille !
A noter, également une Bande Originale particulière où on entend avec un plaisir immense "Night in white satin" de The Moody Blues
Le réalisateur Bertrand Bonello écrit la musique de son long-métrage, une partition "lynchienne" faite de textures électroniques et d'ambiances sonores instaurant un climat d'angoisse. Nous y entendons également le chant des esclaves de la musique soul des années 60 (Lee Moses) ainsi que la mélancolie intemporelle et inexorable du Concerto pour piano n° 23 en la majeur de Mozart ou de la nouvelle réinterprétation de "Plaisir d'amour" par Eloïse Decazes (chanteuse du groupe ARLT).
A propos de la musique de son film, il dit :
« Avec le film d'époque, ce qui me fait peur c'est la reconstitution. Quand j'écrivais, j'écoutais cette soul music des années 60 et l'âme de ces voix de chanteurs Noirs Américains me ramenait à ces filles. Quand l'une d'elle meurt, elles entonnent autour d'elle un chant d'esclave. On n'est pas obligé de mettre un quatuor à cordes parce qu'on est en 1900. Ca n'était pas juste pour dépoussiérer, ces femmes m'évoquaient cette musique, peut-être le rapport à l'esclavagisme. »
La critique est unanime…
J’en ai choisi une, de Thomas Agnelli (Paris Première) que je trouve particulièrement belle et très proche de mes ressentis
Aux antipodes d’un quelconque érotisme racoleur, L’Apollonide – Souvenirs de la maison close est un vrai mélodrame au souffle tragique et au faste éteint où les fantasmes d’amour et l’ivresse des étreintes hantent les corridors cramoisis. Pendant deux heures, le scenario épouse les trajectoires incertaines de belles endormies fanées avant d’avoir éclos, recluses dans un gynécée à l’abri du monde extérieur. En échappant aux écueils théoriques et en s’entourant de comédiennes toutes également remarquables, le cinéaste réussit, à force d’audaces narratives, à mêler l’émotion et l’abstraction, à stimuler l’intellect et le sensoriel pour tendre à l’universel. Il parle aussi de cinéma, donnant à mesurer la puissance des images, orchestrant la rencontre de réalisateurs qu’il a aimés dans un bordel à la recherche du temps perdu. Gangréné́ par une mélancolie proustienne, ce film-mouroir aurait pu empester la naphtaline. Il s’avère en réalité inquiétant et fascinant jusqu’à l’hypnose, regorgeant de fulgurances sublimement grotesques. En cette période de standardisation extrême, Bonello reste l’un des rares cinéastes capables de filmer, pour la beauté́ du geste, des larmes de sperme sur les joues tristes d’une fille de joie.
Enfin « L’Apollonide », fait l’objet d’une exposition jusqu’au 31 octobre au BLAQ OUT (52 rue Charlot, Paris 3, pour le lancement de la BO qu'’ils éditent !
BONNE SEANCE
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