Croquis réalisés par D. et confiés à mes soins
Les rues de l’ile étaient presque désertes, seuls quelques touristes téméraires déambulaient comme des âmes en peine, pour conforter leur statut de villégiateur. Seul le bruit du vent dans les drisses et les haubans des bateaux amarrés traduisait la proximité du port de la station estivale qui ne méritait plus son appellation, désertée momentanément de ses promeneurs.
De ruelles en ruelles, plus ou moins goudronnées, un véritable dédale les menait en silence jusqu’à une adorable petite maison de plage au bord de la grève.
La surprise de Manon était de taille, la bâtisse relevait plus du cabanon aménagé que d’une véritable demeure. Mais pour autant, une réelle ambiance artistique et sensuelle se dégageait de la masure gentiment agencée, dans des couleurs bleus et blanches. Partout, aux murs, des peintures, des esquisses, essentiellement des femmes nues ou à demi dénudées campaient un décor à l’inspiration érotique.
« Voilà, vous êtes chez vous !
-Troublant !
-Vraiment ? Qu'’est-ce qui vous trouble ?
-Toutes ces femmes ?
-Vous vous sentirez moins seule !
-C’est une vision ! Êtes-vous peintre ?
-Amateur, seulement amateur !
-De jolies femmes aussi !
-Aussi, cela se voit donc tant que cela !
-Des modèles ?
-Des amies !
-Peu farouches, convenez-en
-Comme vous ! Vous suivez un inconnu, sans sourciller un instant
-J’avoue ! Inconsciente aussi, on me le dit souvent, mais peu importe, je suis ainsi !
- Voulez-vous voir votre chambre ?
-Oh oui, et surtout, la salle de bain, je rêve d’une vraie douche !
-Raté, la douche est à ciel ouvert !
-Merveilleux, cela me rappellera la Thaïlande. J’adore !
-Tant mieux, je vous laisse vous installer ! Voilà ! »
Une adorable chambre accueillait Manon, un nid d’amour, harmonisée en couleurs et douceurs !
Elle se jetait sur le grand lit à barreaux moelleux, puis s’y vautrait, roulant et riant comme une jeune enfant retrouvant le confort de sa chambre.
Une lumière tamisée laissait entrevoir des étagères chargées de nombreux bouquins, romans et autres , de carnets à croquis empilés, de pots regorgeant de crayons, fusain , pastels , tout ce qui fait qu'’une esquisse nait sous les doigts d’un artiste et de son inspiration. Elle aimait cette atmosphère, elle s’y retrouvait au milieu de nulle part par la magie du destin.
Sur un petit guéridon, une photo renvoyait l’image d’un couple heureux dans un pèle -mêle de prises de vues, parmi lesquelles, Julien, en plus jeune resplendissait ! Elle ne posait aucune question, alors que Julien l’abandonnait dans son installation.
Elle ne résistait pas à l’attirance de la création, pour que le gout des heures soit plus doux ! Elle puisait dans le pot à esquisse un fusain gras et gris, et entamait dans son boudoir momentané, de dessiner, couleur de gris, cette gueule d’amour qui l’accueillait sans artifices dans les méandres de ses secrets. Elle se perdait, dans une esquisse improvisée, dans ses yeux vert de gris, en espérant que le destin lui sourit un bref instant, en espérant qu'’il la retrouve dans sa chambre en secret.
Le dessin lui parlait, lui soufflait des mots injurieux, de ces mots qu'un homme prononce lorsque une amante gourmande le fait jouir jusqu’au cœur de son âme !
Juste enrobée d’un pagne, elle rejoignait Julien.
« Une douche, ayez pitié de moi
-Pitié, ce n’est pas vraiment le premier mot qui titille mes lèvres ! Cachez vous malheureuse, ou je ne réponds plus de moi !
-LOL, s’exclamait-elle
-Nous sommes dans le réel, oubliez ces termes inappropriés…Voilà, Madame, votre douche !
-Idyllique ! »
Elle se laissait aller sous la voute étoilée et le jet réchauffant de la douche céleste. Juste un moment divin de la tiédeur de l’eau sur un corps enflammé par la puissance démoniaque de baisers espérés. Retenant ses désirs jusqu’au bout de ses doigts, elle n’offrait à son corps qu'’un plaisir sanitaire, avant que de rejoindre son asile de la nuit.
La nuit à présent portait son manteau noir. L’heure de la femme venait de sonner, l’heure de se vêtir de dentelles, de rimmel et de rejoindre un hôte particulièrement séduisant pour une idylle insensée dans des nuages sans présage ! Une nuit fauve, c’est bien cela qu'’elle désirait dans un amour à l’imparfait pour un futur conditionnel ! Quelques dentelles noires pouvaient jouer la différence, éveiller ce qu'’il faut de mystère pour un homme qui aime les femmes
A peine maquillée, un rouge carmin sur les lèvres, un trait noir au bord des cils, légèrement féminisée d’un robe noire choisie au hasard dans ses affaires, elle rejoignait Julien, qui l’attendait un verre de Champagne à la main.
L’ivresse de ses lèvres murmurait le mot frisson, qu'’elle déclinait inconsciente dans la brèche de ses yeux en un vertige imprécis.
Elle se souvient de tout, un souffle sur son cou, la courbe de son cul qui ne résiste pas à cette haleine masculine effleurant sa peau comme un aphrodisiaque
Les fleurs du mâle s’avéraient fatales pour ce corps en perdition dans les dédales de l’érotisme, ces désirs fous loin des vertus. Ses lèvres ne réclamaient à présent que des baisers gourmands sur ses seins frémissant, sur ses reins enflammés par ce regard couleur du ciel à la morte saison. Pourtant l’automne la désespère et la couleur du ciel l’indiffère, sans amour tout est toujours pareil.
Elle aimait de cet homme la grâce et la bohême, et dans un sourire plus doux, elle lui tendait comme une offrande, son portrait esquissé au fusain dans le désir !
Réciprocité des genres, il la remerciait d’un baiser volé, puis, enthousiasmé par leurs ressemblances, il trinquait en faisant tinter les verres …
« A l’artiste, murmurait-elle
-A la femme, à vous, répondait-il, avant de lui ôter le verre de la main, et de glisser les siennes sous l’étroitesse de sa robe si peu sage …Je savais, je savais, mais où est donc la plaisancière ? »
Il savourait déjà les courbes de son fessier sous la fièvre de ses mains d’artistes. Il en épousait la moindre ligne, le plus infime grain de peau dans la tourmente de ses envies.
A suivre ...
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