Do savait se faire désirer et j’en étais ce soir la première victime. Je m’armais de patience et laissais libre cours à ses plaisirs de danse. A l’identique d’un musicien ou d’un chanteur qui se laisse pénétrer et emporter par la musique, Do, dans ses déplacements semblait en totale fusion avec elle-même. En la regardant ainsi évoluer, je me plongeais moi-même dans ses sensuelles mouvances, imaginant son corps dans les moments intimes d’une étreinte érotique dans une ambiance velours. J’ai toujours pensé, et cela s’est toujours vérifié, qu'’on peut d’un seul regard, déceler la gourmandise charnelle d’une femme à sa manière de danser. Le corps s’exprime, dans toute sa splendeur, sur des notes ensorceleuses, à l’identique de celui de l’amoureuse se laissant posséder par des caresses audacieuses sur sa peau offerte à la musicalité d’un amant langoureux. Oui à cet instant, je songeais à Do vibrant sous mes audaces sur ses seins parfumés, je songeais à sa cambrure ondulante, corruptrice sensuelle d’un homme sous tension.
Quand allait-elle cesser d’ainsi me malmener, quand allait-elle cesser de me mettre sous pression, elle était diabolique dans la perversité de son jeu à se faire désirer. Je n’ai point ou peu de goût pour les plaisirs faciles, mais à ce stade ce n’est plus de difficultés dont il s’agissait, mais bien de domination teintée de perversion. Perverse, perverse de me faire ainsi languir de façon aussi naturelle. De quelle manière subversive pouvais-je la punir d’ainsi me torturer. Etait-elle consciente du bouillonnement qui coulait dans mes veines, jouait-elle l’insouciante ou les provocatrices. Je puisais dans mes expériences d’amours passagères. Rendre une femme jalouse est une tactique peu honorable et pourtant il n’est meilleure amoureuse qu'’une femme jalouse. Elle était là, ma délivrance, assise à côté de moi, une charmante jeune femme au regard brun et chavirant.
Une concurrente jeune et belle, quoi de plus déstabilisant pour une femme trop sûre d’elle. La belle brune me jetait des sourires énamourés depuis quelques instants dans le reflet du miroir en arrière du bar, des sourires concupiscents, assujettis de regards enjôleurs, de ceux qui font systématiquement mouche, pour peu que l’on soit homme solitaire pour un soir dans une ville loin de chez soi. Je connais, pour ne les avoir que trop croisées, ces âmes féminines si solitaires qu'’elles sont prêtes à quelques dérives sans lendemain pour tromper le vide sentimental de leur vie. La tâche était aisée, voire presque routinière, presque ennuyeuse. Au pire des cas, je pouvais assumer un refus si je lui offrais un verre. Je revêtais mon costume de salop machiavélique et me lançais, dans la langue locale
« Do you want something to drink ?
-Avec plaisir !
-Française ?
-Of course ! »
Ses grands yeux de biche me désarmaient et que dire de sa bouche pulpeuse à souhait. Un instant, l’idée d’emporter les deux femmes dans mon antre m’effleurait, fantasme des fantasmes de chaque homme, amateur de femmes, normalement constitué.
« Ce sera la même chose que vous !
-Un baby please »
Le barman servait le verre à ma nouvelle compagne, un soupçon réprobateur dans le regard. De toute évidence, il n’appréciait guère mon infidélité ou peut-être tout simplement la jalousie n’était-elle pas typiquement masculine.
Je trinquais avec exubérance, nos verres s’entrechoquaient avec sincérité, elle se présentait, nous échangions nos prénoms. Elle répondait au doux prénom de Mathilde ! Coïncidence maléfique ou mauvais tour du destin, j’en restais pantois !
« Mathilde ?
-Oui, vous n’aimez pas ?
-Oh si, si beaucoup, j’ai fait la connaissance dernièrement d’une Mathilde pour laquelle j’ai eu un vrai coup de cœur. Mais en fait… »
Le barman s’interposait de façon fort cavalière
« Math , this guy is friend with Do !
-Vous connaissez Do ?
- Oui, c’est ma mère ! Bad guy ! »
Elle éclatait de rire !
Grand moment de solitude ! Ce que j’avais pris pour de la jalousie dans le regard du barman n’était autre qu'’une mise en garde, ou une tentative d’avertissement .Quel con !
Tout prenait soudainement un sens, le choix du prénom de Mathilde, et l’intervention inopinée du barman qui m’avait arraché in extremis d’un dérapage fatal !
Ma machiavélique entreprise de déstabilisation tournait au flop le plus sordide lorsque Do daignait enfin abandonner la piste. Elle se rapprochait au plus près de moi, me posait un baiser sur les lèvres, un baiser humide de désir et de sueur parfumé.
Puis se tournant vers Mathilde, elle murmurait en souriant
« Je vois que vous avez fait connaissance ! Comment as- tu deviné Alex que tu avais affaire à ma fille ? »
Mon regard, je le présentais, obscurcissait encore plus mon avenir entre les bras de dos. Un sourire consenti tentait d’illuminer mon visage, en vain !
Mathilde, Mathilde m’accablait soudain !
« A la vérité, Maman, il n’a rien deviné du tout, il m’a branchée, m’a offert un verre ! Je suis sure qu'’il a même du songé un instant à nous baiser toutes les deux sans savoir que j’étais ta fille .il a du me prendre pour de ces filles d’un soir
-Bien, puisque les présentations sont faites, inutile de rajouter quoi que ce soit, Alex, je crève de faim , on y va ! »
Avant même que je puisse prononcer un seul mot, elle avait tourné les talons en direction de la sortie, sans prêter un seul regard à sa fille qui levait sa main à mon intention en signe d’adieu
Finalement je n’avais pas forcément fait le mauvais choix en offrant un verre à Mathilde !
Laquelle des deux était la plus jalouse de l’autre ? Difficile à affirmer !
« Ta fille est plutôt rebelle, tout le portrait de sa mère ! Aussi belle !
-Arrête de te foutre de moi !
-Do !
-Quoi !
-J’ai envie de toi !
-Marchons un peu, nous trouverons bien un endroit tranquille pour nous retrouver !
-Nous retrouver !
-Aurais-tu oublié mon jouet, il ne dort que depuis trop longtemps au fond de mon sac ! »
Elle avait cette diablerie en elle qui me rendait dingue d’un seul regard d’une seule phrase !
Elle s’accrochait à mon bras et m’entrainait dans les rues glaciales de Chicago à la recherche d’un nid sensuel improvisé !
Malgré le froid me pénétrant jusqu’aux os, sous mon caleçon il faisait aussi chaud que dans l’âtre d’une cheminée. Elle s’inquiétait de ma raideur et me murmurait, j’aime que tu bandes pour moi, ici ou ailleurs, partout ! »
Puis elle nous arrachait à la lumière des réverbères dans une rue plus camouflée sous quelques tourbillons résiduels de flocons neigeux !
A suivre
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