Dans un quartier centré d’un Paris printanier, je m’attarde un instant le temps d’un déjeuner.
L’élégance parisienne est exclusivement masculine. Je cherche en vain, des jupes fluides, des robes glamour, des escarpins, des bas coutures, mais rien, rien qui ne vienne accréditer la réputation de l’élégance de la gente féminine française.
Par ailleurs, ce qui est loin de me déplaire, des cols blancs cravatés m’offrent un défilé permanent à l’heure de la pause.
Une assiette nordique, un amour scandinave en moi toujours présent, me monopolise le temps de faire disparaitre les crampes me torturant depuis plus d’une heure à présent.
Le saumon fumé dépecé sous la lame de mon couteau, les toasts et autre blinis grignotés du bout des dents suffisent à faire rapidement taire les grondements de mon estomac robotisé par mon horloge biologique.
Rassasiée, je peux me prêter enfin à mon passe temps favori sur les terrasses des cafés et brasseries parisiennes aux premiers rayons du printemps.
Je me délecte du ballet incessant que m’offrent ces messieurs costumés, cadres ou dirigeants, arrachés à leur emploi du temps, l’espace d’une cigarette ou d’une pause café prolongée.
Trois d’entre eux, plus laxistes ou moins surchargés de boulot s’installent à mes côtés .Il est l’heure pour eux de recharger les batteries, d’une salade vite avalée et d’un café serré.
Je me plonge sans conviction, dans un bouquin que je viens de me procurer, non sans difficulté, à la Fnac Saint Lazare. La raison ?
Avez-vous eu la curiosité un jour, de rechercher le rayon de la littérature érotique dans ce genre d’endroit…peu importe l’enseigne, c’est toujours en bas d’une console, dans un coin perdu du magasin…En plus là n’est pas le pire ….parfois le genre littéraire a carrément disparu. C’est le cas de la Fnac des Ternes, à Paris. A croire que la célèbre enseigne ait perdu la légitimité de sa réputation d’agitateur de curiosité…
Je me plonge donc dans un bouquin de poche, de ceux qu'’on lit pour tromper sa solitude à la terrasse d’une brasserie. Enfin pas vraiment …je lis des nouvelles érotiques, « Sensualités », de Martin Laliberté, un auteur Canadien.
Pas vraiment accrocheur, pas vraiment original, pas vraiment littéraire, pas vraiment rien du tout …Je m’ennuie rapidement …Il n’y est question que de vulve, de poils duveteux et blonds, ou de poils plus taquins et arrogants, de doigts qui s’insèrent, de pines qui crachent …Un univers érotique qui ne me correspond pas , j’abandonne , pose mon bouquin sur la table , et recherche dans mon sac un calepin….j’ai du temps devant moi, mon amie ne me rejoindra qu'’en fin d’après midi…
Un sein, une main, masculine, l’illustration de mon bouquin, il n’en faut pas plus pour subtiliser l’intérêt d’un de mes voisins qui commence à sérieusement à s’ennuyer sous les analyses professionnelles déferlantes d’un de ses collègues…Discrètement sous les verres de mes lunettes de casse- couilles, heu pardon presbyte, mon cristallin trahit mon âge, j’envisage d’un regard lointain mon voisin…
Port aristocratique, lueur du feu dans les yeux, cheveux argentés, une petite cinquantaine stabilisée, une belle gueule, une gueule quoi …séduisant, très séduisant dirais-je ! J’ai juste envie de le croquer !
Sur mon calepin, mon bloc à esquisses, ses traits grossiers naissent, un arrondi, une arête de nez, l’ombre de lèvres, des yeux sans âmes, esprit volé sur l’amalgame de mes pensées ….J’estompe son charme sous les empreintes de mes doigts, j’intellectualise ses émotions sous la ferveur de mon crayon …
Je le regarde avec passion, et lorsque son regard se pose dans le mien, je l’affronte en tentant de le dévoyer, pour d’une lueur lubrique éclairer sa pupille qui nait sous mes doigts.
Dieu qu'il est beau sous mon regard, Dieu qu'’il est troublant, entre troublé et timide, pudeur et impudeur.
Les hommes entre eux ne demeurent jamais bien sérieux, souvent leurs dialogues dérapent sur des terrains glissants …
Je m’amuse, je souris de cette déviance et lui, lui, il rougit …j’adore ce semblant d’indifférence qu'’à mon encontre il tente d’établir…
Mais je poursuis mes exigences, à savoir dresser de lui un portrait, celui d’un homme fugace qui passera dans ma vie sans y être invité.
D’une oreille discrète, j’emprisonne des bribes de discussions. Il y est question de Barbara, la dernière stagiaire qui s’est fait sauter par Marc, le jeune type du marketing, ou encore D’Isa, qui dit-on est bi….C’est tendance ! Et toi Arnaud ?
Arnaud, c’est son prénom, pas mal avec cette belle gueule d’amour qui ne rime pas avec toujours !
« Ah au fait, Gilles, note mon nouveau numéro perso…. »
Je gomme, j’efface, j’espace, je note 06 12 13 08 ..
Je peaufine mon esquisse, signe mon ébauche, tourne un regard vers Arnaud, adresse un sourire à Gilles sans qui je n’aurais pu acquérir le numéro ! Puis sans aucune explication ni retenue, je me lève et perchée sur mes hauts escarpins, m’approche d’Arnaud lui tend le dessin. Dans la foulée, je réclame l’addition, règle ma note et tente de m’éclipser sous le regard intrigué du croqué…
« Attendez, je vous offre un café
-Merci mais je n’ai pas le temps »
Je m’échappe, le sourire aux lèvres, heureuse du trouble et de l’émotion provoqués par ma mystérieuse intrusion, pénètre au « Chat Bleu » acheter quelques bouchées savoureuses puis me dirige vers le parc Monceau tout proche en repassant devant la brasserie….Arnaud n’est plus là !
Lorsque j’aborde le Parc Monceau, je cherche un banc ….m’assoie !
Un instant d’amusement, une gueule d’amour en mémoire, je compose un sms sur mon Smartphone
« Merci pour le café Arnaud, mais j’avais juste envie de vous croquer ! »
Envoyer
Le bruit familier de la réception d’un texto m’interpelle, et une voix bien réelle que je reconnais déjà punit mon intrusion…
« Je suis là à présent, j’ai juste envie que vous me croquiez »
Secrètement je remercie Martin Laliberté et ses « Sensualités », puis le temps fait une pause dans laquelle je m’engouffre sans réfléchir !
Je crois que j’aime déjà ma punition, mais n’avais pas recherché la correction !
Elle m’était soudain apparue comme une belle insouciante vivant dans une bulle, ignorant tout à coup le B.A BA des règles les plus élémentaires de la vie en société. Gentiment foldingue, elle était d’une sensualité adolescente dans sa nouvelle tenue pour le moins très fraiche. Paradoxe agréablement surprenant, elle avalait un dernier verre de Chablis jusqu’à la dernière goutte, me rappelant coquinement que quand elle aimait elle pouvait se délecter jusqu’à la lie.
« J’espère que tu aimes le jazz, le swing, et surtout que tu e un homme armé de patience !
-Pas vraiment pour la patience, mais le jazz et le swing, oui, et tu as l’air si enthousiaste !
- Heureuse, le mot est heureux ! On y va ? Mais je veux m’assurer de quelque chose auparavant ! »
Elle glissait sans préavis sa main entre mes cuisses, tâtait amoureusement, mes attributs masculins, s'attardant sur mes valseuses, avant que de m’exprimer dans un naturel déroutant ses émotions les plus franches.
« Ce qui me plait chez toi, c’est que tu es méchamment burné, ce n’est pas si courant tu sais ! »
J’aurais du rougir, mais j'éclatais de rire, éludais la remarque, mais au jeu de la provocation, elle avait trouvé un partenaire idéal !
« Ah oui vraiment, tu à l’air de connaitre la partie, ou les parties devrais-je dire ? Je n’ai pas pour habitude de comparer mes couilles avec mes congénères, mais je te crois sur parole ! Et en quoi cela te plait ? »
Elle éclatait de rire à son tour , et ne prêtait aucune réponse à ma question, m’entrainait dans ses éclats de rires, sa main amarrée à la mienne dans son cheminement.
Dans le couloir feutré du building américain, elle récidivait, avant de rejoindre la terre ferme.
Elle me plaquait au mur, dans le chuchotement du mécanisme de l’ascenseur grimpant, ré- jaugeait mes ardeurs d’une main impudique parcourant en tendresse la toile du jeans, soudainement tendue par mon sexe affolé de tant de convoitise.
« Glisse-toi, un instant dans la peau de Benjamin, ignorant ! Est-ce que tu sais vraiment, combien pour toi j’en pince ? Glisse un doigt, une main, sous ma robe, si tu veux connaitre le secret qui nous a rapprochés poursuivait-elle , un regard énamouré plongé dans le mien
-Un secret ! Quel secret ?
-Glisse tes mains, je te le confierai. »
Je reconnaissais là l’auteur, capable d’inventer n’importe quoi, par jeu ou par provocation. Metteur en scène, réalisatrice, scénariste de ses propres fantasmes, elle était capable, sans véritable force de persuasion, de vous entrainer dans la perversité de sa douce mythomanie.
Je glissais donc un doux baiser derrière le lobe de son oreille, et une main érotisée entre ses cuisses, jusqu’au cœur du sensoriel de sa féminité. Sa mouvance aussi soudaine qu'’incontrolée me suggérait, qu'’il n’était point nécessaire de perdre une partie de la soirée dans une boite de jazz, à l’autre bout de Chicago. Sa croupe, ses hanches malmenées par le désir corroboraient mes espoirs intuitifs …Et pourtant, la maitresse reprenait ses droits lorsque la cabine de l’ascenseur atteignait notre étage…Elle repoussait ma main, réajustait son jupon de crinoline, assortissait son entrée dans la nacelle d’un sourire faussement bienveillant à l’encontre des clients sortant.
« Tu croyais quoi, me murmurait-elle, une fois dans l’intimité retrouvée et les portes refermées, que j’allais renoncer à une soirée privilège au Green Mill ?
-Renoncer non ! Repousser peut être !
-Tu mérites le secret de notre rencontre ….Un pouce du destin …une valise complice …je me rends compte de mon erreur …je ne dis rien, tu es un homme séduisant …tu me plais …la suite tu la connais !
-Qui me dit que tu dis la vérité ?
-Rien, tu es donc obligé de me croire , mais sache que j’ai remarqué que tu me poursuivais à l’aéroport , sauf que …tu as chamboulé mes plans .Ah si seulement tu avais été plus rapide …
-Je n’aurais pas eu le plaisir d’ausculter tes bagages, de faire la connaissance de Mathilde, et surtout de t’accueillir dans ma chambre. Passée une première réaction colérique, l’intrigue l’a emporté
-Alors finalement tu aimes le scenario !
-Le scenario ? Chercherais-tu un sujet pour ton prochain bouquin ?
-C’est une idée ! Tu aurais pu m’envoyer balader, j’aurais pu tomber sur un maniaco-dépressif ou à l’inverse un pervers ou encore un timide maladif ! Avoue qu'’il y a matière à épiloguer !
-Au lieu de cela tu tombes sur un type tout à fait normal ou presque qui se laisse envouter par une diablesse en quête d’aventure !
-Non, mais pour qui tu me prends ! Je ne cherche rien du tout ! C’est juste la faute de la valise ! Et de ta jolie petite gueule d’amour !
-Un diner aurait pu tout aussi bien faire l’affaire, au lieu de cela, tu me demandes de te baiser, tu me séquestres avec quelques sushis dans la chambre et puis…
-Et puis nous allons passer une délicieuse soirée…
-Et puis ?
-Après à toi de prendre des initiatives !
-Quoiqu’il en soit ma belle, ta valise est toujours chez moi avec un merveilleux complice érotique à l’intérieur !
-C’est de cela dont tu veux parler ?, me disait-elle en sortant le joujou de son sac
-Incroyable, tu es incroyable !
-A présent je te laisse la prérogative de la suite des événements !
-Je ne sais si !
-Si je te suivrais…Tu verras bien ! »
Elle était d’un aplomb déconcertant dans le diabolique de son jeu provocateur ! De quoi était-elle donc capable pour bousculer mes émotions. A la seule pensée qu'’elle puisse inopinément jouer dans la soirée avec son toys, me plongeait irréversiblement dans le désir. L’étroitesse soudaine de mon jeans en était la preuve irréfutable.
Nous atteignions enfin le lobby, quasi désert. Je suivais ma belle aventurière qui remontait le col de son manteau avant de se plonger dans l’atmosphère d’une ville américaine enneigée.
Des flocons lumineux voltigeaient dans un ciel neigeux avant de recouvrir le sol de leur écume blanche. Avant de braver la froidure Do s’attardait un instant sur ce tapis neigeux, le nez en l’air, la bouche ouverte, récoltant sur sa langue les floconneux cristaux glacés, en riant comme une enfant émerveillée. Puis elle saisissait mon bras et se lovait contre moi pour parer à toute éventualité de chute sur les trottoirs glacés. Sa chaleur corporelle irradiait tout mon corps .Malgré le froid saisissant je ne débandais plus jusqu’à la bouche de métro la plus proche.
A nouveau assagie par la promiscuité des passagers de la ligne rouge, Do s’improvisait, le temps du trajet, guide touristique. Pour avoir séjournée régulièrement à Chicago, elle m’instruisait avec passion sur l’architecture de la ville. Pèle mêle, elle me parlait du Lac Michigan, des balades délicieuses qu'’il permettait quand le temps l’autorisait, de la Chicago River, cette rivière vert bleuté serpentant entre les buildings, de La Willis Tower, anciennement Sears Tower, le gratte ciel le plus haut du continent américain. Elle finissait son monologue culturel sur un cours quasi universitaire, me vantant les mérites de l’architecte Frank Lloyd et de ces célèbres « Prairies Houses » dont elle m’invitait à visiter l’une d’entre elle , La Robie House , située à l’angle de deux rues de Hyde Park. Elle était intarissable sur le sujet, passionnante et passionnée par le sujet qu'’elle développait sur le trajet.
Do, cette femme que je ne connaissais que depuis quelques heures me fascinait littéralement Son enthousiasme culturel me ravissait autant que son exaltation érotique. Au terme de ce voyage didactique, nous quittions Le Chicago Transit Authority et la station aérienne de Lawrence à, à peine un peu plus de 100 mètres de Green Mill.
Une neige fine et serrée tombait à présent sur Chicago, nous rapprochant un peu plus l’un de l’autre .Do manifestait à présent l’excitation d’une enfant à la veille de découvrir ses cadeaux de Noël.
« Tu vas adorer, me susurrait-elle à l’oreille, et moi follement excité par son enthousiasme juvénile, ne résistais pas à ce désir fulgurant de lui donner un baiser profond, au seuil de la tolérance pudique dans un pays à la morale plus scrupuleuse que notre vieille France.
A la source de ses désirs, cette voix qui résonne, et le soleil brûlant qui effleure sa peau.
Au creux de son oreille, les rires de son adoré, et la douce mélodie de ses mots qui enrobent ses moments solitaires.
Sous le feu des rayons de notre vieil astre solaire, son corps nu et luisant, s’alanguit et languit de quelques caresses que la main passagère de son amant pourrait bien lui donner.
Le roman qu’’elle lit ne lui offre plus à présent que quelques lignes floues.
Est-ce le sommeil qui la gagne, la torpeur imposante d’une somnolence naissante ou le plaisir criant que réclame son corps ?
L’insouciance la rejoint.
Toujours entièrement nue, Ignorant la décence, dans son écrin de verdure, elle abandonne, portée par un courant sensuel, les pages floutées du bouquin et les héros à présent sans intérêt pour la femme domptée par ses désirs érotiques.
Les morsures du soleil, la chaleur qui l’accable, l’entrainent malgré elle vers un sommeil profond .
Son érotisme latent teinté de la virtuelle présence de son amant, ne tarde pas à rejoindre son esprit engourdi .
Oniriques émotions, désirs inavoués pour son tendre pygmalion l’arrachent aux bras de Morphée pour l’offrir en pâture à ceux moins reposant, d’Eros ce trublion.
Dans les eaux troubles où il l’emporte, elle se laisse embarquer par ses pulsions, le souffle court, le corps ondulant satisfaisant ses instincts de femme peu sage.
Des perles de sueur irriguent son visage, elle entrouvre les yeux, puis les plisse à nouveau en tentant vainement d’occulter le rideau de lumière qui trouble sa vision.
Son assoupissement au bord des eaux bleutées n’a en rien assagi ses désordres charnels .
Elle se prête sans complexe aux intrusions solaires pénétrant son étui en un rayonnement.
La jouissance bruisse dans ses gémissements étouffés par les babillages des nombreux oiseaux assistant à la scène, un mélange subtil de gazouillis, jacasseries et stridulations.
Perdue dans un désir dont elle ne maitrise plus ni les tenants, ni les aboutissants, elle lutte, pour autant, pour ne point succomber à ce mauvais génie lui insufflant, dans un murmure languissant,
« Laisse toi aller, fais toi jouir »
Son portable vibre, son ange prend vie, à l’autre bout des ondes …
« Allo »
C’est lui, celui qu'’elle attendait …
Le suave de sa voix n’émet plus qu'’un souffle, une haleine de désir, presque imperceptible mais si délatrice pour son amant complice
« Envie de toi, de tes doigts, de tes lèvres, de ta queue »
Point besoin de prier.
De sa voix étouffée, l’ange ressuscité accompagne ses gestes, promenant la main libre de sa coquine amante sur son ventre brûlant, déléguant ses caresses à ses doigts de gourmande.
Le plaisir grandissant emporte son amante, dans un long et suave gémissement, dont il se délecte avant même de l’avoir saluer.
Elle de son côté recueille sur ses doigts le jus de sa récolte par l’entremise diabolique de son charmant complice.
Le silence accueille ces derniers instants mystérieux de l’orgasme féminin et puis par jeux ou par provocation, enfin elle répond….
« Bonjour Mon Ange, je pensais à toi !
-Vraiment ? Que fais-tu, où es-tu ?
-Je prends le soleil en lisant un roman. Tu sais, il est encore plus diabolique que toi !
-Qui ?
-L’intérimaire !
-L’intérimaire ?
-Le soleil, bien sûr …Il avait pris ta place, l’espace d’un instant, pour un plaisir fugace, entre mes cuisses ouvertes.
-Le salop !
-Du calme Mon Ange ! Ne m’as-tu pas dit que tu n’étais pas jaloux !
-Garce, mon adorable garce, j’ai aimé ton accueil et ses soupirs troublants…
-Bien, à toi à présent ! »
Ils en rient en songeant que bientôt, ils ne feront plus qu’’un, un seul cri, un seul corps pour un plaisir unique.
Deux Délicieux diablotins suspendus au destin entretiennent le feu avant l’embrasement !
Je ne sais si j’étais plus impressionné par son initiative ou par sa nouvelle silhouette. De toute évidence, elle n’avait pas aimé ma sélection vestimentaire .Elle avait opté pour une robe, tout aussi glamour, mais plus seyante. A la sobriété séduisante de l’incontournable petite robe noire, elle avait préféré le vintage plus excentrique d’une robe rockabilly, largement serrée à la taille. Le bustier baleiné, le large jupon ondulant avait transformé ma gourmande en véritable pin up des années 50, prête à aller swinguer dans une boite de jazz. Cette surprenante métamorphose n’était pas pour me déplaire .Je resongeais à Mathilde, ce que je ne manquais pas de faire remarquer à Do, alias Diane.
« Comme Mathilde, tu as le goût du déguisement ! »
Elle me reprochait immédiatement ma maladresse quant à mon choix du mot déguisement, inapproprié en de telles circonstances. J’avais oublié sous le charme de la pin up, qu'’elle était aussi auteur et accordait par conséquent beaucoup d’importance aux choix des mots.
« Déguisement ! Ton manque de tact est vexant ! Tu me trouves déguisée ?
-Je me suis mal exprimé. Je me rappelle du passage de ton manuscrit où Mathilde avait revêtu le rôle de Tara King
-Quelle mémoire !
-J’ai adoré ce passage, il ressemble tant à l’instant …Attends ! »
Je récupérais le manuscrit et entamait la lecture de l’extrait. Elle s’asseyait confortablement, un verre de Chablis à la main …
« Choisis, Benjamin, choisis ma tenue »
De nombreux cintres alignés méthodiquement, des tenues plus glamours les unes que les autres, des escarpins, des cuissardes à hauts talons, accessoires en tout genre allant du chapeau en passant par des boas ou encore des perruques et même des loups...
« Mathilde, mais qu’est ce que c’est que tout çà. Où sont tes robes ? Je veux dire celles que tu portes, enfin tu vois celles de Mademoiselle Mathilde, la prof de violoncelle.
-Mademoiselle Mathilde n’existe pas, elle est juste un rôle de composition ...Mademoiselle Mathilde a disparu en l’espace d’une nuit, le rideau est tombé, fin du premier acte.
-C’est encore mieux que je ne l’imaginais, mais je me sens comme un con quand je pense aux bas que je t’ai offerts, tu dois en avoir à revendre.
-Dis- toi seulement que tu es plus perspicace que les hommes qui m’entourent, tu as su me faire sortir de ma tanière et ne serait-ce que pour cela, je ferai tout pour que tu le regrettes jamais. Fais moi plaisir, choisis ma tenue »
Etrangement il avait choisi une tenue un peu particulière, exempte de glamour .Il avait misé sur l’excentricité de l’association vestimentaire.
Son premier regard avait été attiré par une jupe courte, entièrement recousu de pastilles noires, une de ces jupes des années soixante, cette période particulière où Courrège, démocratisant la jupe, avait fait de la mini-jupe l’élément phare de ses collections.
Benjamin nostalgique et grand amateur de la célèbre série anglaise « Chapon melon et bottes de cuir », avait opté pour cette pièce insolite qu’il avait assorti à un col roulé marron et moulant, une paire de bas opaque et des cuissardes en daim noir. Il avait omis la lingerie ...un oubli imposé par sa lubricité sous-jacente et aussi, dans l’attente d’une réaction de Mathilde.
Mais, cette absence de dentelle ne l’avait en rien intriguée, du moins n’en avait-elle pas fait démonstration.
« Tiens Mathilde, voilà j’ai fait mon choix
-Ma parole Benjamin, tu veux me faire ressembler à Tara King...
-Tu ne crois pas si bien dire. Je garde un souvenir mémorable de son passage dans la série, saison six.
-Tu es incroyable...
-Non, tout simplement fan.
-Alors ok, j’endosse le rôle, n’en déplaise à mes détracteurs. Mais si tu joues au jeu des personnages, tu risques de t’y perdre avec moi
-Je suis prêt à relever le défit. Ajoute donc ça à ta tenue »
Il lui avait tendu une perruque brune parfaitement en accord avec la décennie de la tenue vestimentaire.
« Ils ne vont me reconnaître à l’académie...elle en avait souri
-Si cela te dérange, oublie...
-Pas le moins du monde, je suis aussi excitée qu’une jeune adolescente.
-Fais gaffe, si tu continues je vais devenir ton aîné...
- Ce serait trop drôle ! »
Elle était réapparue quelques instants plus tard, totalement méconnaissable et tellement séduisante hautement perchée sur ses talons, sa coupe mi- courte et ses yeux de biche que Benjamin avait assorti la brillance de son regard d’une insoupçonnable tension sous le coton de des caleçons.
« Tu me fais bander, Mathilde !
-Je vois, mais bon nous verrons cela plus tard, veux-tu, allons y, Dear Mister Steed»
Elle avait peaufiné sa tenue des années sixties d’un manteau vintage et d’une touche de son parfum avant que de sortir fière et rajeunie au bras de son jeune chaperon non peu moins fier qu’elle, compte tenu des regards inquisiteurs masculins des passants anonymes sur leur sillage.
La tenue de Mathilde, pour le moins inappropriée tant due à l’heure matinale, qu’à la saison avait intrigué plus d’un usager dans le métro, mais la légèreté de la situation lui avait ôté tout scrupule .Tout simplement elle se sentait bien et le jugement d’autrui ne l’avait même pas effleuré.
« J’ai l’impression d’être avec une autre femme, et pourtant à cet instant précis c’est de toi dont j’ai envi, la Mathilde qui m’a intrigué et séduit »
Elle m’arrêtait net dans ma lecture !
« En parlant de Métro, que dirais-tu si nous allions au Green Hill en métro ? On prend le Chicago L à Monroe jusqu’à Lawrence. Ligne rouge, c’est direct. Elle fonctionne en permanence, c’est génial non ?
- Une vraie Chicagoanne !Je crains que comme Mathilde, tu n’attires les regards
-Comme Mathilde, je m’en fous, et comme Mathilde je ne porte pas de petite culotte ! Seras-tu aussi audacieux que Benjamin ?
Devant mon étonnement, elle me subtilisait le manuscrit et poursuivait la lecture …
« Je parie que si je glissais mes doigts entre tes lèvres, ils seraient inondés de ton désir, je me trompe
-J’aime l’idée que tu puisses me caresser quand bon te semble, que tu puisses abuser de mon hospitalité intime...
-Arrête, ne bouge plus, où je vais me faire arrêter pour attentat à la pudeur »
Discrètement elle avait glissé sa main libre, sur le ventre de Benjamin, puis nettement plus bas qu’en dessous de la ceinture.
« Humm...j’adore cette protubérance ...j’aime te faire bander ! Ah c’est là...concentre toi, il va falloir sortir le plus discrètement possible du Wagon »
« Bien, ça suffit la lecture à présent …On les mange ces sushis, je crève de faim me lançait-elle en me conviant du regard à rapprocher la desserte. Ah au fait, mon déguisement vient de chez Cheap Jacks Vintage, un des plus grands magasins de vintage de New York »
Elle avait la rancœur tenace .Elle ne m’avait pas pardonné ma maladresse, et se jetait sur les sushis qu'’elle dégustait avec intempérance ce qui n’était pas sans me rappeler sa gourmandise charnelle dont nous n’étions, je le souhaitais, qu’à l’apéritif.
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