Le miroir de l’entrée, sur notre passage, nous renvoie le reflet d’un beau couple, pourtant en discordance, une virile jeunesse sculptée au service d’une féminité mature en pleine possession de sa libido. J’ose à peine songer à l’effet que peut produire une telle intrusion dans un restaurant gastronomique presque essentiellement fréquenté d’Italiens .Je ne sais pourquoi cette année, ils ont envahi la côte …mais une chose est sûre ils sont là, et bien présents .Je ne m’en plains pas, j’adore les Italiens.
J’ai bien dit les Italiens au masculin, parce que les Italiennes sont si pulpeuses et si désirables qu'’elles peuvent faire ombrage à la plus séductrice des françaises …A vrai dire, j’adore lorsqu’on me prend pour une italienne, je trouve cela très flatteur. D’ailleurs la plupart du temps, quand un flagorneur énamouré ou tout simplement en quête d’émotion m’affirme dans la discussion « Vous êtes Italienne, cela se voit », je ne cherche absolument pas à le dissuader. Au contraire, je réclame les preuves de son affirmation…
« Votre peau mate, vos yeux grands yeux verts, et surtout cette arrogante présence, cette assurance insolente » Encore, encore !
Bien, c’est bien ce que je pensais, le restaurant est bondé d’italiens …et d’Italiennes. Et comme prévu, notre arrivée est loin de passer inaperçue, sans compter sur Alessandro, qui m’accable tout à coup d’un rôle très tendance dans les milieux branchés, celui de femme Couguar ! Alessandro fait beaucoup plus jeune que son âge, ou alors il m’a effrontément menti, au choix. Je parie sur le premier cas de figure, car son attitude désinvolte revêt tout de même un tempérament mature. Mains sur mes hanches, il interpelle le maitre d’hôtel à l’entrée !
« S’il vous plait, nous avons réservé une table !
-Oui, Monsieur à quel nom ?
- A quel nom Dominique, quel est votre nom ? »
Il rit, le goujat, en me posant un baiser langoureux sur mon épaule parfumée. Il me plait vraiment ce garçon, cela en devient inquiétant…A peine 35 ans et déjà toutes les qualités requises, humour, tendresse, sagacité, et cette incroyable clairvoyance antidatée quant à mes réactions. Il aime à me contrarier, laminer mon assurance d’une simple réplique insidieusement déplacée. Il aime à me déstabiliser, sans jamais pour autant y parvenir totalement.
Je lui glisse un mot à l’oreille …
« Vraiment ? J’adooore !
-Ah ! Dominique intervient Brigitte, la propriétaire de ce lieu culinaire, je vous ai donné la dernière table, désolée, vous ne pourrez être face à face …
-Aucun souci Brigitte, j’adore la promiscuité de mon hôte ! N’est-ce pas Alessandro ?
-In punto !
-Qu'’est ce qui vous prend, vos parlez italien maintenant !
-Préférez-vous le brésilien ? Você me agrada !
-Y usted tambien ! »
Nous prenons place, le long de la haie du jardin qui fait office de salle de restauration .Nous avons une vision panoramique sur l’endroit et mieux encore sur la clientèle. Je m’en réjouis d’avance … De grandes tablées rient, fêtent tel ou tel événement, d’autres plus familiales, et plus éloignées de nous, Dieu merci pénalisent un peu l’ambiance festive qui semble régner ici. La clientèle estivale est bien différente de la fréquentation annuelle, mais pourtant mon regard se pose sur une assemblée équitablement partagée homme femme, dont l’une d’entre elles, n’arrête pas de me dévisager. A moins bien sûr, que ces regards insistants ne s’adressent à mon étalon piscinier. Je l’interroge du regard, mais il ne me répond qu'’en glissant sa main sous l’étroitesse de ma robe !
« Je veux juste vérifier que vous ne me mentiez pas tout à l’heure !
-De quoi parlez-vous ? »
Il me répond par un chuintement mi amoureux, mi luxurieux, au creux de mon oreille.
« Vous avez la réponse !
-Délicieux, humide à souhait ! »
Il porte mon odeur à son « doigt de l’ange », avant de s’inquiéter de mon appel interrogatif.
« Dites-moi, je vous sens intriguée !
-Diriez-vous que cette femme, là en face, est intéressée par vous ou par moi?
-Je suis prêt à parier par vous, mais le plus simple est de lui demander, qu'’en pensez-vous ?
-Et bien on peut dire que vous êtes pragmatique, vous !
-Pas vous ?
-Non pas vraiment…
-Mais commandons du champagne, nous verrons cela plus tard, cela nous donnera le temps de faire une analyse plus pointilleuse avant d’intervenir. Etonnez –moi Miss Do, étonnez-là de votre charme félin, étonnez-nous, nous n’attendons que çà, elle et moi.
-Vous êtes dingue !
-De vous oui, vous avez un don d’ensorceleuse dont je veux que vous abusiez »
A ce rythme là, et s’il ne bride mes chevaux sous le capot, nous n’irons pas plus avant que les entrées !
« Pourrions-nous avoir une bouteille de champagne s’il vous plait ? »
Commandé, servi, partagé, j’en offre une flute par le biais d’un serveur interposé à ma soi- disant admiratrice, lui imposant l’audace d’un verre levé à sa santé.
« Dominique, vous êtes magnifique d’arrogance, vous l’avez piquée au vif…Trinquons à nous à présent …mais avant ! Embrassez-moi ! »
J’obéis, un vrai baiser profond nous unit, mais je ne peux détacher mon regard de cette femme insolite dont le regard perdu au milieu du mien accueille mon jeux comme un défi. D’un seul trait elle avale, son verre de champagne !
Je ne sais lire dans ses yeux, je ne vois, ni colère, ni jalousie, mais j’y invente du désir se répandant jusqu’au creux de ses dentelles.
A coté de nous les discussions vont bon train, en Italien assurément, sous les regards émoustillés au masculin, assassins au féminin.
« Dominique, toutes les femmes ici ne vous veulent pas que du bien ! Je ne vous traduirai pas ce que j’ai entendu !
- Je ne veux pas savoir ce que pense une mal baisée ou pas baisée du tout »
Alessandro amusé par ma réplique acerbe est rayonnant, mais je sais, je sens qu'’il ne sait plus quoi penser ! Il ne sait probablement plus s’il est sorti avec la femme ou l’écrivaine, ou les deux !
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