Croyez-vous au destin ? Moi je n’y croyais pas, trop rationnel parfois, en quête d’explications, permanentes, épuisantes.
En un mot c’est ce qui m’a conduit dans ce centre d’aide psychologique, situé à quelques pâtés de maison de mon appartement .On se balade, le nez en l’air, à la recherche de rien ou de n’importe quoi, puis l’illusion survient, surgie de je ne sais où, on entre on dit bonjour, poli discipliné. Puis ainsi tout s’enchaîne, on prend un rendez-vous, un de plus, un de trop, mais qu’importe car il faut s’en sortir, mieux régenter sa vie, oublier ses malheurs occulter tous ses maux pour à nouveau vivre à peu près normalement.
En ce jour printanier, fort de mes convictions, songeant qu’après une séance de psy tout ira beaucoup mieux, je me sentais plus léger, moins drainé dans cette spirale infernale qui m’attire vers le fond.
Les souvenirs sont là, les absences cruelles et douloureuses, mais les filles légèrement vêtues, les jupes courtes, les jambes belles, la délicatesse d’un printemps annoncé viennent diluer toutes les pensées amères.
Avant de rentrer dans ce centre d’aide, je l’ai soudain aperçue, elle marchait devant moi comme une jeune écolière, empreinte de fraîcheur et de féminité.
Alors je l’ai suivi, stupidement .Au niveau de l’adresse de mon rendez-vous, elle a soudain ralenti, j’ai accéléré le pas pour ne pas l’effrayer. J’ai pensé un instant qu’elle devait travailler et que ma soudaine intrusion dans sa vie quotidienne pouvait à ses yeux présenter un danger. J’ai continué mon chemin, comme si de rien n’était, jusqu’au bout de la rue, et puis suis revenu sur mes pas, elle avait disparu.
Etrange apparition me suis-je dit, mais oh combien plaisante pour le névrosé traumatique que je suis. A force de fréquenter les cabinets de psy on finit par en adopter leur langage alambiqué ...
Encore sous le charme de cette vision fugace, je suis rentré dans la salle d’attente, me dirigeant aussi droit qu’un I mais sans le point dessus, vers le bureau d’accueil, me suis présenté et puis me suis assis comme tout un chacun enfin dans le jargon commun comme un con, attendant qu’un homme ou une femme m’interpelle à l’heure dite de mes dévoilements psychothérapiques.
J’allais me plonger dans un de ces magazines que l’on nomme people, histoire de me donner une contenance au milieu de cet assistance de déprimés anonymes, quand je l’ai aperçu, assise en face de moi.
En un instant, le temps de l’apercevoir, elle a bouleverse mon quotidien et malmené tout mon désespoir .Un seul regard, timide avorté m’a suffi pour tomber sous le charme de cette inconnue.
M’efforçant de détourner mes yeux de ce minois attendrissant, je me suis plongé dans des lectures débiles traduisant les vies plus ou moins dissolues des stars médiatisées.
Une phrase dénuée de toute rationalité a ponctué soudain mon semblant d’intérêt pour des lectures illustrées d’images insidieuses.
« Je ferme la porte, vous aurez plus de lumière » enfin quelque chose du même acabit, à vrai dire je ne m’en souviens pas, tant mon esprit était bien plus encombré de chose moins futile.
Je ne sais pas pourquoi, peut être l’étonnement, cette soudaine intervention m’a donné le courage d’entamer la conversation avec la jeune femme.
« Avez-vous, vous aussi, rendez-vous avec un psy », lui ai-je demandé en toute simplicité
A peine ma phrase prononcée, j’ai soudain réalisé que je venais de dire une grosse connerie !
Mon humour antérieur à ma dépression passagère, j’essaie de m’en convaincre, a éveillé une réponse du style « Ben non, je viens acheter le pain », mais pourtant la délicieuse créature que je venais d’importuner m’a répondu doucement
« Oui, je viens assez souvent », mais je n’ai pas occulté les trémolos dans sa voix et ces soudaines larmes qui ont embrumé ses yeux, essayant malgré elle de retenir ses pleurs.
« Depuis trop longtemps je crois »
Sa voix en disait long sur un traumatisme enfoui, une espèce de monstre la dévorant de l’intérieur.
Je n’ai pas insisté, mais quand elle s’est levée pour venir me rejoindre, mon corps s’est imprégné d’une bien étrange sensation, un sentiment que depuis longtemps je n’avais plus ressenti.
Elle était là, face à moi, me murmurant des mots qui ressemblaient à ça :
« Il y a si longtemps que personne ne s’intéresse plus à moi »
Cet instant je le vis, chaque seconde, chaque minute comme une révélation de mon âme à mon corps
Cette fragilité soudaine, inopinée, exacerbée par une féminité sûrement bafouée par un être immonde aux pouvoirs carnassiers et dévastateurs m’a soudain fait bander, comme un âne, un taureau, moi qui ne bandait plus depuis un an déjà.
Qu’avait-il du lui faire pour ainsi la traumatiser ? Un instant j’ai songé à des violences, violences conjugales, voir même sexuelles, mais quand elle a pris ma main, j’en ai tout oublié.
Mon psy est venu me chercher, mais nous n’étions plus là.
A l’instant fatidique où on interpellait mon nom, j’étais tout près de là, dans les bras d’une femme, gourmande de ma vie, gourmande mon sexe.
Mon appartement, déjà très bordélique, s’est vu soudain souillé de quelques vestiges vestimentaires supplémentaires.
Elle m’a servi un verre de vin, a mis un disque sur la platine, puis s’est déshabillée, laissant choir sans complexe ses vêtements sur le sol et m’offrant son corps en totale liberté.
Pas un mot, pas un cri, juste l’ivresse de deux êtres perdus qui viennent de se rencontrer, elle m’a dit qu’elle m’aimait mais je ne l’ai pas cru, je lui ai dit tu m’as guéri, elle n’a pas entendu.
Nous nous sommes livrés en totale impudeur à toutes ces étreintes que l’on dit ravageuses, et quand elle a joui, longtemps, violemment, implorant son Dieu et tous ses saints, plantant ses longs ongles rouges dans mes fesses bandés, j’ai oublié du psy, même à son existence, promettant à ma douce de l’aimer plus longtemps que toute sa vie entière.
Fougueuse rencontre ou dérive traumatique, quoi qu’il soit, aujourd’hui, elle et moi nous nous aimons de passion, de rêves, de confusion et de complicité et pour tout vous avouer, aucune séance de psy ne m’a jamais été aussi bénéfique.
© 2008 Mystérieuse
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