Ce matin là, je suis arrivé très tôt à l’aéroport. L’excitation du voyage, voilà plus d’un an que je n’avais pas pris de congés, m’avait empêché de dormir.
A quoi bon rester couché, quand on sait que quelques heures plus tard, le décor d’un nouveau continent vous accueillera, agréablement ou pas, c’est selon.
Tout dépend en vérité de votre capacité à la discipline avec ces agents de la police des frontières, et ceux des Etats unis ne sont pas les moindres en matière de filtration.
Enfin peu importe, je suis donc arrivé dans un aérogare quasi vide à cette heure matinale.
Le temps de trouver le comptoir de ma compagnie Iberia, et me voilà dans une file jalonnée de cordons tendus.
Il n’y avait pas foule en vérité ,d’ailleurs le comptoir d’enregistrement n’était même pas ouvert, ni même le vol annoncé.
Déposant mes bagages, enfin mon bagage, un homme seul ne rivalise en rien avec l’armada de valises et autres sacs d’une voyageuse, je me suis plongé dans le journal du matin à la recherche de quelques bonnes nouvelles, si cela est possible.
Je n’avais en rien remarqué la jeune femme qui me précédait dans la file, jusqu’à ce que je l’entende parler, une voix suave ponctuée ici ou là de rires.
Elle était accompagnée d’un couple de personnes âgées, à en juger par leur discussions, il s’agissait sûrement de ses parents. Mais j’avais détourné mon attention, par souci de politesse, craignant de déranger leur intimité. Puis ses supposés parents s’étaient éloignés discrètement en quête d’un quelconque café ouvert.
Presque instinctivement, elle avait engagé la discussion.
« Nous sommes légèrement en avance, je ne vois même pas l’ombre d’une hôtesse
-Oui, effectivement, l’envie de partir le plus vite possible sûrement !
-Vous partez à Madrid ?
-Dans un premier temps, en fait juste une escale, je pars sur Miami
-Connaissez-vous Miami ?
-Non du tout, c’est mon premier voyage aux Etats-Unis
-Vous allez aimer, c’est une ville très agréable, je connais bien pour y avoir vécu, vous avez choisi la bonne période, la température est encore agréable, après à partir d’avril ça devient suffocant. Vous devriez aller jusqu’à Key West, il y règne une ambiance d’un autre temps.
-C’est dans mes projets, et puis je suis seul, je vais où bon me semble...le célibat a ses plaisirs !
Elle était très agréable, peu farouche et totalement séduisante. Cette rencontre inopinée avait pigmenté mon escapade, songeant un instant que sa compagnie à bord de l’avion pourrait agrémenter de façon fort plaisante mon vol jusqu’ à Madrid.
En séducteur invétéré que je suis, solitaire ponctuel dans ma vie de célibat, je suis très sensible à la gente féminine, et je ne rejette jamais la compagnie avenante d’une femme pour peu que celle –ci présente à mes yeux un quelconque intérêt, physique ou intellectuel.
Mais à vrai dire, il faut bien l’avouer ,en ce jour béni des dieux, j’étais gâté, car elle était un compromis des deux argumenté de surcroit par un sourire et un charme peu commun.
Les belles femmes sont souvent hautaines, voir glaciales, mais pas elle.
Elle avait cette classe des femmes en tailleur juchée sur de hauts escarpins, mi bourgeoise, mi femme d’affaire, un sourire dans le regard en plus. C’est d’ailleurs le rôle que je lui avais attribué bien malgré moi, si ce n’était le nombreuses incalculables de bagages qu’elle devait enregistrer.
Cheveux châtain en cascade sur les épaules, des yeux noirs et pétillants, des lèvres mutines, des pommettes joliment rehaussées, telle était la délicieuse créature qui se tenait devant moi.
« Vous allez aux Etats-Unis aussi ?
-Non du tout, je vais à Panama
-Panama ? Quelle drôle de destination pour des vacances ...
-Je ne pars pas en vacances...je pars définitivement !
-Ah désolé, j’aurais pensé...
-J’ai des affaires immobilières sur place que je gérais depuis la France, mais cela devenait de plus en plus difficile, alors voilà je quitte le vieux continent et croyez moi sans regret...
-Oui je comprends, la vie devient de plus en plus difficile ici
-Oui et puis surtout, je n’ai plus aucune attache ici, si ce ne sont mes parents, mais ce sont de grands voyageurs, cela leur donnera l’occasion d’un nouveau voyage.
-Je vous trouve très courageuse !
-Courageuse n’est pas le mot que j’emploierai, envie de repartir à zéro serait plus judicieux
J’avais ressenti une lassitude dans le ton de sa voix et pourtant aussi une force de persuasion, une persévérance.
Cette combativité avait soudain exacerbé mon attirance pour cette jeune femme si gracile et si solide à la fois, mais aussi, étrangement, avait engendré en moi, une timidité peu coutumière à l’encontre du sexe opposé.
Le prédateur incorrigible que je suis, doublé d’un libertin psychotique avait soudain perdu tout son aura, et les troublants fantasmes qu’éveillait en moi mon interlocutrice avaient eu pour mérite de dresser des barrières déstabilisantes.
Le comptoir d’enregistrement pour Iberia venait de s’animer, coupant court à notre discussion.
Elle s’était affairée à l’enregistrement, mais le volume de ses bagages l’avait amené à se diriger vers un autre comptoir pour surcharge de bagages
Avec ce sourire ravageur, elle s’était excusée, puis m’avait murmuré
« Voulez-vous que nous nous retrouvions plus tard, disons un quart d’heure au bar du premier étage
-Avec plaisir, à tout de suite »
Elle s’était éloignée, accompagnée de ses parents, et sans plus de questionnements je m’étais soumis aux enregistrements d’usage auprès de l’hôtesse de sol.
Elle m’avait rejoint plus rapidement que prévu, délicieusement désinvolte dans sa démarche alors que son tailleur, plutôt strict se prêtait à moins de légèreté.
Nous avons partagé, un café, puis deux, puis trop. Je l’écoutais étaler sa vie et ses déboires, se déceptions et ses désirs. A l’image d’une intervenante professionnelle, excellente oratrice du reste, elle ne m’avait pratiquement pas laissé la parole. Parlant de tout de rien, plutôt de rien que de tout, elle avait entre autre dévoiler son goût pour les lectures érotiques et sa profonde admiration pour le Marquis de Sade...Cette troublante révélation m’avait laissé entrevoir une délicieuse libertine, ou peut être la silhouette d’une femme libérée des fardeaux de la morales judéo chrétienne. L’imaginaire va bon train, dans ces instants, pour un homme comme moi, à la recherche sans le savoir, d’une femme à son identique.
Pour une fois que j’en croisais une, elle s’envolait pour Panama, c’était bien ma chance.
Est-ce mon regard de plus en plus lubrique, mais au détour d’une phrase anodine, le reflet de son regard au fond du mien, elle m’avait lancé au visage
« Si tu veux baiser, c’est maintenant, après il sera trop tard »
Cette soudaine invitation avait semé en moi trouble et confusion, mais lorsque elle m’avait convié à nous rendre en salle d’embarquement, je l’avais suivi, docile, presque soumis à ses pulsions aussi surprenantes qu’envoûtantes.
A SUIVRE ...
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