Louise est une femme secrète, si secrète qu’elle-même parfois n’arrive plus à se décrypter.
Si rayonnante en surface, si douloureuse à l’intérieur, elle passe son temps dans l’écriture, pour elle, pour les autres aussi, ceux qui prennent du plaisir à la déchiffrer. Un véritable exutoire que ces heures passées à étaler ses envies, ses fantasmes...
Certains pourraient qualifier cet étalage littéraire d’exhibitionnisme et assimiler les lecteurs à des voyeurs, mais elle sait, elle sait Louise qu’il n’en est rien ...
Oui, elle écrit de l’érotisme, oui, elle essaie de l’embellir d’images sensorielles empreintes de volupté, oui, elle essaie d’enterrer tous les interdits, d’enjoliver les tabous dans une société malsaine où le sexe si prosaïque en devient pathétique.
Pas de désirs sans image, pas de plaisirs sans partage, elle a trouvé le juste équilibre qui lui permet d’avancer, elle se promène entre rêve et réalité...Mais aujourd’hui Louise a un rendez-vous !
« Vos écrits m’intéressent, souhaite vous rencontrer... »
A la réception de ce mail bien évidemment elle a crié foutaise, encore un opportuniste qui veut s’enorgueillir d’une conquête supplémentaire à épingler sur son tableau de chasse.
Et puis, Louise ,lasse des actes manqués qui ont jalonné sa vie, Louise a répondu « pourquoi pas, et puis quand bien même »
Elle vient de quitter son nid douillet pour une proche inconnue, de l’assurance dans sa démarche, la sérénité bien ancrée dans son esprit d’écrivain en herbe.
Elle a tout oublié de sa sensualité, une tenue pratique, jeans et chemisier blanc, escarpins, les cheveux remontés en chignon déglingué et mèches cherchant à s’évader, rien de plus naturel, une vrai femme moderne de celles sur laquelle on ne va pas se retourner tant elles sont identiques
Elle a tort Louise, les regards, même réservés enrobent sa silhouette de jeune femme pressée dans les rues de la ville qui viennent de l’accueillir.
Un hall d’hôtel anonyme, quelques clients discrets qu’elle repère d’un regard enrobé, des hommes d’affaire en congrès ou autre réunion d’affaire, des jeunes, des plus agés, comment le repérer, lui son interlocuteur.
Elle se dirige, fière, intuition féminine, vers celui dont elle croit être l’intéréssé, tend une main énergique
« Bonjour, je suis Louise, enchantée
-Enchanté, Louise je vous attendais »
La force féminine réside dans ces secrètes capacités à deviner l’impossible
L’exubérance volubile de son rendez-vous la laisse coite, il est empressé, on pourrait le croire presque emballé par ses écrits...
« Ce sont vos poèmes qui m’intéressent, seriez-vous intéressé par l’édition, y avez-vous songé ?
-Oui enfin, non, oui pourquoi pas, je suis ravie de vous plaire, enfin heu, que mes écrits vous plaisent »
Il n’a rien d’un dragueur, il est sérieux.
Mais elle ne peut retenir un regard égaré vers l’homme d’une quarantaine d’années qui semble absorbé par les tableaux de son ordinateur et pourtant la chaleur diffuse qu'elle sessent à la base de son cou ressemble à s’y méprendre à des œillades discrètes qui viendraient l'effleurer
« Vous m’écoutez Louise?
-Oui bien sûr
-Oui donc je vous disais, faites moi parvenir vos poèmes pour que je puisse les étudier.Que voulez vous boire Louise ?
-Un jus de tomate, j’ai arrêté l’alcool surtout en pleine journée, je faisais n’importe quoi !
Hum, fiasco total, Monsieur n’a pas beaucoup d’humour pense-t-elle ! Définitivement très professionnel!
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